15 octobre 2008

Hors sujet mais en situation


Artwork from 0100101110101101.org.

Je sors du bureau avec la nausée. Pas une nausée existentielle, une nausée bien physique. Mon corps réclame de l'air et du mouvement, et mes yeux du repos. Encore une journée à la merci d'une - de plusieurs - de milliards de machines interconnectées qui dictent les cours de mes journées: assis sur une chaise à roulette, le nez pointé sur un gigantesque écran lumineux, la main droite posée sur un objet de plastique arrondi. Pour se donner une illusion de mouvement, les pieds poussent légèrement le sol entre les rayons, imprimant à la chaise à roulette un mouvement rotatif. Les heures passent ainsi, en pivotant sur moi-même en position assise, ma main droite déplaçant par infimes secousses l'objet de plastique arrondi. A force de pivoter je m'enfonce, et mon dos finit par dessiner un grand arc de cercle entre le dossier et le plateau de la chaise. Lorsque je veux atteindre l'objet rectangulaire garni de touches en plastiques posé sous l'écran lumineux, avec lequel j'interagis en imprimant des séries de pressions du bout des doigts, alors je lance mes deux bras en avant pour l'atteindre. Mais comme mes épaules ont glissé jusqu'à la hauteur de la table, ce brusque mouvement fait basculer mes fesses du bord extrême du plateau sur lequel elle s'appuyaient, celle-ci glisse en arrière, et je me retrouve allongé par terre sur la moquette grise de mon bureau. Je réalise alors que devant moi s'ouvre un espace compris entre les deux rangées de tiroirs qui soutiennent le plateau de ma table, qui forme une sorte de refuge. Je m'y enfile alors à quatre pattes, et entreprend de me cacher jusqu'à ce qu'il fasse nuit.

Je ne délire pas, je développe ma conscience de classe. Celle du cognitariat.